Inventaires et propriété des biens mobiliers garnissant une église légalement affectée au culte

Une question portant sur la valeur juridique des inventaires nous est parvenue. Notre juriste, Anne-Violaine Hardel, y répond.

En premier lieu, il convient de distinguer les biens meubles qui garnissaient l’édifice au moment de la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Églises et de l’État de ceux qui y ont été introduits postérieurement. Les premiers sont généralement propriétés de la commune tandis que les seconds relèvent de la propriété privée de la personne qui les acquis, souvent la paroisse, l’association diocésaine ou toute autre personne.

Pour savoir qui est propriétaire, les inventaires constituent une précieuse source. Il y a d’une part les inventaires des biens paroissiaux ( au titre du can.1283 du code droit canonique l’inventaire des meubles précieux ou présentant un intérêt culturel ). Il s’agit là de l’inventaire qui ressort du droit canonique utile s’agissant de la propriété paroissiale.  Pour les biens communaux, il conviendra de se reporter aux inventaires qui ont été dressés en 1906 et déposés aux archives départementales.

Mais quelle est la valeur juridique de ces inventaires ?

Dans une décision – certes ancienne – du tribunal civil de Rufec du 11 février 1925 statuant au sujet d’un meuble qui ne figurait pas à l’inventaire, le juge précise : « L’inventaire ne peut avoir le caractère que lui prête le maire [c’est-à-dire le caractère d’acte authentique selon l’article 1343 du code civil de l’époque]. Dans ces conditions on ne peut soutenir que cet inventaire ait été contradictoire et à fortiori, qu’il ait le caractère d’un acte authentique ». Cette position a été confirmée par la doctrine : « En cas de contestation, la consistance du mobilier communal résultera des inventaires dressés au moment de l’application des lois sur la Séparation. Le mobilier existant à cette époque, s’il n’a pas été compris dans des réclamations ou restitutions, doit être réputé propriété communale. A l’inverse, le mobilier qui ne figurera point aux inventaires devra être réputé ne point appartenir à la commune…Il s’agit là de présomption iuris tantum qui ne s’opposerait point à l’administration d’une preuve contraire. (Auguste Rivet, Traité du culte catholique et des lois civiles d’ordre religieux, T. II,  p. 86).

L’inventaire de 1906 crée une présomption simple de propriété en faveur de la commune, mais en aucun cas, ne crée une présomption irréfragable (qui ne saurait tomber devant la preuve du contraire).  

Anne-Violaine Hardel